Oui, nous sommes vraiment désolées devant tant de propos misogynes tenus, entre autres, par des personnalités publiques et largement relayés dans le domaine public.
Avez-vous entendu Jack Lang ("... il n'y a pas mort d'homme") ? Avez-vous entendu le journaliste Jean-François Kahn ("... qu'il y ait un troussage de domestique") ?
Certes, ces messieurs ont entre-temps publié des mises au point. Il n'empêche, le poison est distillé.
Ces propos et d'autres "tendent à minimiser la gravité du viol, à en faire une situation aux frontières floues, plus ou moins acceptable, une sorte de dérapage".
C'est ce qu'affirment des associations féministes, qui ont lancé samedi avec le concours d'une brochette de personnalités un appel avec près de 6.000 signatures, s'élevant contre "l'impunité qui règne dans notre pays quant à l'expression publique d'un sexisme décomplexé".
Intitulé "Sexisme, ils se lâchent, les femmes trinquent", cet appel est publié par les associations Osez le féminisme, La barbe et Paroles de femmes.
Parmi les signataires figurent l'anthropologue Françoise Héritier, les sociologues Dominique Méda et Eric Fassin, Clémentine Autain, ex-adjointe au maire de Paris, et Yvette Roudy, ex-ministre PS, les journalistes Audrey Pulvar et Christine Ockrent, la comédienne et humoriste Florence Foresti, les écrivains Florence Montreynaud et Isabelle Alonso.Et les signataires de rappeler que, selon les associations, 75.000 femmes sont violées chaque année en France, "de toutes catégories sociales, de tous âges".
Ces féministes s'insurgent contre la perception de l'affaire, telle que relayée par les médias français, dont se dégage "une confusion intolérable entre liberté sexuelle et violence faite aux femmes".
Cette perception montre que "la parole des femmes victimes de violences sexuelles est suspecte", écrivait cette semaine, dans une tribune au quotidien Libération Clémentine Autain, figure de la gauche radicale et elle-même victime d'un viol.
Gisèle Halimi, avocate et militante féministe, s'exprimait ainsi : "Nous sommes dans un affrontement du pot de terre contre le pot de fer. La vérité, c'est qu'il y a la parole d'une femme meurtrie, d'une femme blessée. Quel intérêt peut-elle avoir à dénoncer ce qu'elle subie."
Pour les féministes, les blagues sexistes ou encore la confusion entre agressions sexuelles et libertinage envoient surtout un mauvais signal aux victimes, l'impression que leur parole sera toujours remise en cause.
Les initiateurs de l'appel annoncent un "rassemblement contre le sexisme" ce jour, dimanche, à 17h à Paris, place Igor Stravinsky, près du Centre Pompidou.